IP case law Court of Justice

Order of 11 Jul 2023, C-64/23 (Neoperl v EUIPO), ECLI:EU:C:2023:556.



ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

11 juillet 2023 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande d’admission ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C-64/23 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 7 février 2023,

Neoperl AG, établie à Reinach (Suisse), représentée par Me U. Kaufmann, Rechtsanwältin,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice-président de la Cour, MM. M. Ilešič (rapporteur) et I. Jarukaitis, juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. P. Pikamäe, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Neoperl AG demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 7 décembre 2022, Neoperl/EUIPO (Représentation d'un insert sanitaire cylindrique), (T-487/21, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2022:780), par lequel celui-ci a annulé la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 3 juin 2021 (affaire R 2327/2019-5), relative à l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne d’une marque tactile de position représentant un insert sanitaire cylindrique.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

 Argumentation de la partie requérante

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que son pourvoi, tiré d’une violation de l’article 4 du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), de l’article 47, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, notamment, du principe d’interdiction de la reformatio in pejus, soulève une question importante pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union.

7        Tout d’abord, la requérante reproche au Tribunal d’avoir procédé à un examen des conditions exigées par l’article 4 du règlement no 207/2009, alors qu’un tel examen n’avait pas été invoqué par la requérante dans sa requête et n’avait fait l’objet de débats qu’au stade ultime de l’audience, sans qu’il ait été possible aux parties de prendre position à ce sujet. Ce faisant, le Tribunal aurait également porté atteinte au droit d’être entendue de la requérante, ainsi qu’au principe d’interdiction de la reformatio in pejus. En effet, le refus de la marque demandée reposant sur un moyen qui n’a été abordé ni dans la requête, ni dans les mémoires des parties, la requérante serait donc placée dans une situation plus défavorable qu’avant l’introduction de son recours.

8        Ensuite, la requérante estime que, en considérant, aux points 57 et 58 de l’arrêt attaqué, que le signe en cause ne remplissait pas les conditions de l’article 4 du règlement no 207/2009 au motif que la description verbale accompagnant la demande d’enregistrement dudit signe ne précisait pas la représentation graphique de ce dernier, le Tribunal a méconnu sa propre jurisprudence issue de l’arrêt du 30 novembre 2017, Red Bull/EUIPO – Optimum Mark (Combinaison des couleurs bleue et argent), (T-101/15 et T-102/15, EU:T:2017:852, points 46 et 80), en vertu de laquelle la description verbale d’un signe constitue elle-même une représentation graphique de celui-ci.

9        Enfin, la requérante soutient que la question soulevée par le présent pourvoi est importante pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union, eu égard notamment au fait que l’arrêt attaqué entraîne une insécurité juridique sur la possibilité, qui concerne tous les demandeurs futurs de ce type de marques, d’enregistrer une marque tactile de position. En effet, si, au point 36 de l’arrêt attaqué, le Tribunal semblerait admettre la possibilité d’enregistrer les marques tactiles de position, cette affirmation serait remise en cause par ses appréciations aux points 57 et 58.

 Appréciation de la Cour

10      À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20 et jurisprudence citée).

11      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, seconde phrase, du règlement de procédure de la Cour, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 16 novembre 2022, EUIPO/Nowhere, C-337/22 P, EU:C:2022:908, point 24).

12      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22 et jurisprudence citée).

13      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

14      En l’occurrence, en ce qui concerne l’argumentation de la requérante, telle que résumée aux points 7 et 9 de la présente ordonnance, il convient de constater que, si la requérante identifie, certes, des erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal, il n’en demeure pas moins qu’elle n’expose pas à suffisance de droit les raisons concrètes pour lesquelles de telles erreurs, à les supposer établies, soulèveraient des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union qui justifieraient l’admission du pourvoi. En effet, la requérante se borne à reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en considérant que la marque contestée ne remplissait pas les conditions visées à l’article 4 du règlement no 207/2009 et à affirmer que l’arrêt attaqué est susceptible d’entraîner une insécurité juridique, sans expliquer avec suffisamment de précision et de clarté, en quoi exactement les constatations du Tribunal relatives à l’examen des conditions d’enregistrement d’une marque soulèveraient une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 11 juillet 2022, Laboratorios Ern/EUIPO, C-187/22 P, non publiée, EU:C:2022:547, point 16).

15      Dès lors, force est de constater que la requérante n’a pas respecté l’ensemble des exigences énoncées au point 12 de la présente ordonnance.

16      En outre, en ce qui concerne l’argumentation évoquée au point 8, tirée d’une méconnaissance, par le Tribunal, de sa propre jurisprudence, il y a lieu de rappeler qu’une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. En effet, le demandeur doit respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 12 de la présente ordonnance (voir, par analogie, ordonnance du 20 octobre 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO, C-446/22 P, EU:C:2022:827, point 16 et jurisprudence citée).

17      Or, en l’occurrence, si la partie requérante précise les points de l’arrêt attaqué et ceux de la décision du Tribunal qui auraient été méconnus, elle ne fournit toutefois aucune indication sur la similitude des situations visées dans la jurisprudence qui aurait été méconnue, permettant d’établir la réalité de la contradiction invoquée.

18      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

19      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

20      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

21      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.


2)      Neoperl AG supporte ses propres dépens.

Signatures

*      Langue de procédure : l’allemand.



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