IP case law Court of Justice

Order of 20 Mar 2007, C-325/06 (), ECLI:EU:C:2007:176.



ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

20 mars 2007 (*)

«Pourvoi – Projet communautaire de système de navigation par satellite (GALILEO) – Préjudices subis par les titulaires de marques et raisons sociales contenant le terme ‘Galileo’ – Pourvoi en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé»

Dans l’affaire C-325/06 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 25 juillet 2006,

Galileo International Technology LLC, établie à Bridgetown (La Barbade),

Galileo International LLC, établie à Wilmington, Delaware (États-Unis),

Galileo Belgium SA, établie à Bruxelles (Belgique),

Galileo Danmark A/S, établie à Copenhague (Danemark),

Galileo Deutschland GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne),

Galileo España, SA, établie à Madrid (Espagne),

Galileo France SARL, établie à Roissy-en-France (France),

Galileo Nederland BV, établie à Hoofdorp (Pays-Bas),

Galileo Nordiska AB, établie à Stockholm (Suède),

Galileo Portugal Ltd, établie à Alges (Portugal),

Galileo Sigma Srl, établie à Rome (Italie),

Galileo International Ltd, établie à Langley, Berkshire (Royaume-Uni),

The Galileo Co., établie à Londres (Royaume-Uni),

Timas Ltd, établie à Dublin (Irlande),

représentées par Mes J.-N. Louis et C. Delcorde, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. M. Huttunen et W. Wils, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. J. Klučka, président de chambre, MM. U. Lõhmus et A. Ó Caoimh (rapporteur), juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. R. Grass,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, les requérantes demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 10 mai 2006, Galileo International Technology e.a./Commission (T-279/03, Rec. p. II-1291, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté leur demande tendant, d’une part, à ce que la Commission des Communautés européennes cesse d’utiliser le terme «Galileo» en rapport avec le projet communautaire de système global de radionavigation par satellite (ci-après le «projet») et d’inciter des tiers à utiliser ce terme ainsi que, d’autre part, à ce que soit réparé le préjudice qu’elles auraient subi du fait de l’utilisation et de la promotion par la Commission dudit terme, prétendument identique à des marques dont elles sont titulaires ainsi qu’à leurs noms commerciaux.

 Le cadre juridique

 Le droit international

2        L’article 8 de la convention pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris le 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, ci-après la «convention de Paris»), énonce:

«Le nom commercial sera protégé dans tous les pays de l’Union sans obligation de dépôt ou d’enregistrement, qu’il fasse ou non partie d’une marque de fabrique ou de commerce.»

 Le droit communautaire

3        L’article 5 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), intitulé «Droits conférés par la marque», dispose:

«1.      La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires:

[...]

b)      d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque.

[...]

3.      Si les conditions énoncées aux paragraphes 1 et 2 sont remplies, il peut notamment être interdit:

a)      d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement;

b)      d’offrir les produits, de les mettre dans le commerce ou de les détenir à ces fins, ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe;

c)      d’importer ou d’exporter les produits sous le signe;

d)      d’utiliser le signe dans les papiers d’affaires et la publicité.

[…]»

4        L’article 9, paragraphes 1, sous b), et 2, du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), prévoit:

«1.      La marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires:

[…]

b)      d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque;

[…]

2.      Il peut notamment être interdit, si les conditions énoncées au paragraphe 1 sont remplies:

a)      d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement;

b)      d’offrir les produits ou de les mettre dans le commerce ou de les détenir à ces fins ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe;

c)      d’importer ou d’exporter les produits sous le signe;

d)      d’utiliser le signe dans les papiers d’affaires et la publicité.»

 Les antécédents du litige

5        Les faits à l’origine du litige ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 18 de l’arrêt attaqué de la manière suivante:

«1. Terme ‘Galileo’ utilisé par les requérantes

1      Le groupe d’entreprises Galileo [...] est l’un des leaders mondiaux dans l’offre et la fourniture de services électroniques pour les secteurs du transport aérien, du voyage, des loisirs et de l’industrie hôtelière, en ce qui concerne l’accès aux données relatives aux offres, aux horaires et aux informations de prix. [...]

2      Le terme ‘Galileo’ est un élément des noms commerciaux, des raisons sociales et des noms de domaine des requérantes. La requérante Galileo International Technology LLC est titulaire de diverses marques nationales, verbales et figuratives, [...] comme les marques verbales GALILEO enregistrées en France le 17 septembre 1987, en Allemagne le 18 août 1988 et en Espagne le 3 octobre 1988.

3      La requérante Galileo International Technology LLC est, en outre, titulaire de plusieurs marques communautaires qui ont été enregistrées en vertu du [règlement nº 40/94] par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI). [...]

[...]

5      Ces marques communautaires et nationales (ci-après les ‘marques des requérantes’) ont été enregistrées pour désigner, notamment, des services de télécommunications sous forme de transmission de données, des programmes informatiques relatifs au transport aérien, à la location de véhicules et à la réservation de voyages, des services de divertissement, des services dans le secteur du logement et de la restauration ainsi que des appareils électriques et informatiques, ordinateurs, logiciels et traitements de textes.

2. Terme ‘Galileo’ utilisé par la Commission

6      Le 10 février 1999, la Commission a adopté une communication, intitulée ‘Galileo − L’engagement de l’Europe dans une nouvelle génération de services de navigation par satellite’ [COM (99) 54 final]. Par cette communication, la Commission visait à permettre l’instauration d’un système satellitaire, appelé Galileo, couvrant les besoins des utilisateurs civils du monde entier en matière de radionavigation, de positionnement et de synchronisation. [...]

[...]

8      Le 22 novembre 2000, la Commission a adopté une communication au Conseil et au Parlement européen sur Galileo [COM (2000) 750 final], qui décrit les résultats de la phase de définition du programme Galileo et expose ses aspects économiques et financiers ainsi que la structure de sa gestion. S’agissant des phases successives du programme, la communication fait état d’une phase de développement des satellites (2001 à 2005), d’une phase de déploiement concernant leur fabrication et leur lancement (2006 et 2007) ainsi que d’une phase d’exploitation économique et commerciale du nouveau système (à partir de 2008).

[...]

11      Dans sa communication au Parlement et au Conseil du 15 octobre 2002, intitulée ‘État d’avancement du programme Galileo’ (JO C 248, p. 2), la Commission a relevé que le programme Galileo serait géré par une entité privée pendant les phases de déploiement et d’exploitation opérationnelle. À cette fin, un appel d’offres devait être lancé par l’entreprise commune Galileo visant à sélectionner le consortium privé qui se verrait attribuer la concession pour le déploiement et l’exploitation du système.

12      Devant le Tribunal, la Commission a souligné l’importance capitale d’un système européen de radionavigation en termes technologiques, économiques et stratégiques, [...]. Selon la Commission, le futur système européen proposera:

–        un service de base gratuit, destiné à des applications ‘grand public’;

–        un service commercial destiné à des fins professionnelles ;

[...]

13      [...] En ce qui concerne la phase d’exploitation commerciale, la Commission a déclaré, devant le Tribunal, que son lancement était prévu pour l’année 2010.

[...]

4. Échange de correspondance entre les requérantes et la Commission

17      Par lettre du 30 avril 2001, les requérantes ont protesté auprès de la Commission contre l’usage du terme ‘Galileo’ pour intituler son projet de radionavigation. Elles ont soutenu que cet usage leur causait des préjudices et enfreignait leurs droits de marque. Le 4 février 2002, la Commission a répondu en affirmant que l’usage du terme ‘Galileo’ pour son projet ne constituait pas une atteinte à des droits de marque.

18      Par la suite, les requérantes et la Commission ont entretenu un échange de correspondance intensif. Les requérantes ont maintenu leur position selon laquelle la Commission utilisait le terme ‘Galileo’ dans un contexte commercial en incitant des tiers à en faire de même, et ce pour des produits et services semblables à ceux visés par les marques des requérantes. La Commission considérait, en revanche, que Galileo restait jusqu’en 2008 un programme de recherche et de développement technologique qui ne générait, jusqu’à cette date, aucun revenu commercial et que les services de réservation fournis par les requérantes étaient des activités tout à fait différentes du positionnement par satellite.

[...]»

 L’objet de la procédure devant le Tribunal

6        Par requête déposée le 5 août 2003, les requérantes ont demandé au Tribunal:

–        d’interdire à la Commission:

–        de faire tout usage du terme «Galileo» en rapport avec le projet de système de radionavigation par satellite;

–        d’inciter, directement ou indirectement, des tiers à utiliser ce terme dans le cadre du même projet;

–        de participer à l’usage par un tiers de ce terme;

–        de condamner la Commission à leur payer, conjointement et solidairement, la somme de 50 millions d’euros en réparation du préjudice matériel subi;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la Commission persisterait à utiliser le terme «Galileo», de la condamner à leur payer la somme de 240 millions d’euros;

–        de condamner la Commission à leur payer des intérêts moratoires calculés par rapport au taux de référence de la Banque centrale européenne majoré de 2 points de pourcentage à compter de la date d’introduction du recours;

–        de condamner la Commission aux dépens.

 L’arrêt attaqué

7        Les requérantes ont fondé leur recours devant le Tribunal, à titre principal, sur le principe de la responsabilité de la Commission du fait d’un acte illicite et, à titre subsidiaire, sur le principe de sa responsabilité du fait d’un acte licite.

8        Les demandes d’injonction et d’indemnisation introduites par les requérantes au titre des articles 235 CE et 288, deuxième alinéa, CE étaient tirées d’une atteinte aux droits de marque qui ont été conférés à celles-ci par l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104 et, en substance, par l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, d’une part, et d’une atteinte aux raisons sociales, noms commerciaux et noms de domaine des requérantes, protégés par l’article 8 de la convention de Paris, d’autre part.

9        Aux points 28 à 74 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la recevabilité des divers aspects de ce recours.

10      S’agissant en particulier des moyens des requérantes tirés de l’atteinte portée à leurs raisons sociales et à leurs noms de domaine, le Tribunal a jugé, au point 59 de l’arrêt attaqué, que le moyen tiré d’une violation de l’article 8 de la convention de Paris était irrecevable.

11      Sur le fond, en ce qui concerne, en premier lieu, la responsabilité de la Commission du fait d’un acte illicite, le Tribunal a rejeté, aux points 103 à 136 de cet arrêt, le premier moyen, tiré d’une violation des droits de marque conférés aux requérantes.

12      Dans le cadre de l’appréciation qu’il a portée sur ce premier moyen, le Tribunal a notamment jugé ce qui suit:

«107      [...] si les requérantes ont réussi à démontrer qu’elles offraient, elles-mêmes, de nombreux services et produits sous le couvert de leurs marques comprenant le terme ‘Galileo’, tel n’est pas le cas en ce qui concerne l’utilisation du même terme par la Commission.

108      Les requérantes n’ont, notamment, pas établi que la Commission offrait elle-même des produits ou des services en relation avec son projet Galileo.

109      Dans leurs mémoires, elles se sont limitées à faire valoir que le projet Galileo de la Commission était orienté vers des ‘utilisateurs potentiels’, qu’il ‘impliqu[ait] le développement’ de logiciels spécifiques, qu’il était ‘destiné à fournir des services’ et que la Commission, par sa demande de marque communautaire, ‘projet[ait] d’utiliser cette marque’ pour distinguer des produits ou des services.

[...]

111      Il convient de rappeler, deuxièmement, que l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive [89/104] et l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 subordonnent également la protection du titulaire de marque à ce que l’emploi du signe en cause par un tiers puisse être qualifié d’‘usage dans la vie des affaires’.

[...]

113      [...] ainsi qu’il ressort du dossier, la Commission n’a, jusqu’à présent, utilisé le terme ‘Galileo’ que pour désigner, de manière globale, son projet de radionavigation par satellite, certes en soulignant les multiples avantages pour les utilisateurs de son exploitation future [...], mais sans établir un lien matériel entre certains produits ou services issus de la réalisation des phases de recherche, de développement et de déploiement du projet, d’une part, et les produits et services offerts par les requérantes, d’autre part. Quant aux produits et services de radionavigation proprement dits, il est constant qu’il n’en existe pas encore au stade actuel du projet [...].

114      Sous ce rapport, il convient de relever notamment que l’usage d’un signe a lieu ‘dans la vie des affaires’ dès lors qu’il se situe dans le contexte d’une activité commerciale visant à un avantage économique (voir arrêt [du 10 avril 2003, Travelex Global and Financial Services et Interpayment Services/Commission, T-195/00, Rec. p. II-1677], point 93 et jurisprudence citée).

115      À cet égard, il est vrai que la Commission souligne la finalité commerciale de son projet. Elle fait tout son possible pour qu’il devienne opérationnel et que des services de radionavigation par satellite puissent effectivement être offerts selon le calendrier prévu, la raison d’être du projet étant précisément son exploitation économique.

116      Il n’en reste pas moins que le rôle de la Commission se limite au lancement de son projet de radionavigation par satellite en tant que ‘réponse européenne’ au système américain GPS et au système russe Glonass, au soutien financier des phases de recherche, de développement et de déploiement du projet ainsi qu’à l’établissement du cadre approprié pour la phase d’exploitation économique ultérieure, notamment, par la participation à la création de l’‘entreprise commune Galileo’ et la publication d’un appel d’offres destiné à l’intégration du projet Galileo aux systèmes existants de navigation.

117      Ce faisant, la Commission n’exerce pas une activité économique dans la mesure où elle n’offre ni des biens ni des services sur un marché. Par l’utilisation du terme ‘Galileo’ dans le cadre des phases de recherche, de développement et de déploiement du projet, situées en amont de la phase d’exploitation économique proprement dite, la Commission ne vise pas à obtenir un avantage économique par rapport à d’autres opérateurs, étant donné qu’il n’y a pas d’opérateurs qui se trouveraient en concurrence avec elle dans ce domaine. Contrairement à la thèse défendue par les requérantes, il n’est donc pas artificiel de faire une distinction, dans le présent contexte, entre la phase d’exploitation économique du projet Galileo et les phases précédentes.

118      Il s’ensuit que les requérantes n’ont pas non plus établi que l’usage par la Commission du terme ‘Galileo’ était susceptible de porter atteinte aux fonctions des marques invoquées et avait lieu ‘dans la vie des affaires’ au sens de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive [89/104] et de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

[...]

122      En réalité, les requérantes n’expriment que leur crainte de voir la Commission faire bénéficier des entreprises privées de sa marque communautaire, une fois cette dernière enregistrée par l’OHMI. Or, cet enregistrement n’a pas encore eu lieu [...]. Eu égard aux voies de droit juridictionnelles ouvertes contre la future décision de la chambre de recours compétente de l’OHMI, il n’est pas possible de déterminer si la demande de marque déposée par la Commission sera finalement acceptée.

123      Il est vrai que le juge communautaire est autorisé, en matière indemnitaire, à condamner l’institution défenderesse au paiement d’une somme d’argent déterminée ou à constater sa responsabilité, même si le préjudice ne peut pas encore être chiffré avec précision, à condition qu’il s’agisse d’un dommage imminent et prévisible avec une certitude suffisante, le juge pouvant ainsi être saisi pour prévenir des dommages plus considérables dès que la cause du préjudice est certaine (arrêts de la Cour du 2 juin 1976, Kampffmeyer e.a./Commission et Conseil, 56/74 à 60/74, Rec. p. 711, point 6, et du 14 janvier 1987, Zuckerfabrik Bedburg e.a./Conseil et Commission, 281/84, Rec. p. 49, point 14).

124      Force est toutefois de relever que cette jurisprudence, si elle permet au juge de faire droit à une demande indemnitaire même en l’absence d’un préjudice chiffré, ne l’autorise pas à condamner l’institution défenderesse sans avoir préalablement constaté que cette institution a effectivement commis une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits à la partie requérante.

125      En l’espèce, il ne suffit donc pas, pour que la Commission soit condamnée au titre de l’article 288, deuxième alinéa, CE, que les requérantes allèguent l’existence d’un simple risque d’une violation future, par cette institution, des droits [résultant des marques dont sont titulaires les requérantes], dans l’hypothèse où elle utiliserait dans la vie des affaires le terme ‘Galileo’ en relation avec des services ou des produits couverts par les marques des requérantes. Ces dernières ont notamment omis d’établir que la présente utilisation, par la Commission, du terme ‘Galileo’ pour désigner son projet impliquait nécessairement une future violation de leurs droits.

126      Il résulte de ce qui précède que l’utilisation, par la Commission elle-même, du terme ‘Galileo’ pour désigner son projet de radionavigation par satellite ne remplit pas toutes les conditions d’application de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive [89/104] et de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

[...]

128      Les requérantes font encore valoir que la Commission a incité et encouragé les entreprises privées intéressées par l’exploitation de son projet à utiliser, dès à présent, le terme ‘Galileo’ à des fins commerciales, c’est-à-dire en relation avec des biens et des services. [...] Selon les requérantes, ces entreprises sont nécessairement appelées à faire usage de ce terme, dans la vie des affaires, afin d’établir la cohérence entre leurs activités et le projet lancé par la Commission. Par conséquent, l’utilisation par le secteur privé du terme ‘Galileo’ devrait être imputée à la Commission.

[...]

133      D’une part, en effet, les requérantes n’ont pas établi que la Commission aurait obligé lesdites entreprises à employer ce terme ou qu’elle les aurait activement incitées, sous forme d’une collusion, à le faire. D’autre part, elles n’ont même pas affirmé qu’il existait des liens organiques et fonctionnels entre les entreprises en cause et la Commission ou que cette dernière exerçait un contrôle en s’immisçant directement ou indirectement dans la gestion de celles-ci. Enfin, rien ne permet de supposer que le choix initial du terme ‘Galileo’ par la Commission ait nécessairement incité les entreprises intéressées à suivre cet exemple, sous peine de compromettre le succès économique du projet tout entier.

134      Les entreprises étant censées connaître le droit communautaire et le droit des marques, il apparaît donc adéquat de considérer qu’elles doivent être tenues pour responsables, au regard des dispositions de droit pertinentes, de leur propre comportement sur le marché, dans la mesure où elles ont choisi d’utiliser le terme ‘Galileo’ dans le cadre de leurs activités économiques.

135      Il s’ensuit que ce choix des entreprises doit être considéré comme étant la cause directe et déterminante du préjudice allégué, l’éventuelle contribution de la Commission à ce préjudice étant trop éloignée pour que la responsabilité incombant aux entreprises en cause puisse être rejetée sur la Commission.»

13      Aux points 137 à 140 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté le second moyen, tiré d’un comportement négligent de la Commission à l’égard des requérantes.

14      Dans ces conditions, le Tribunal a jugé, au point 141 dudit arrêt, que ni l’illégalité du comportement reproché à la Commission ni l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct entre le comportement reproché et le préjudice invoqué n’ayant pu être établies par les requérantes, les conditions de l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté n’étaient pas remplies.

15      Le Tribunal a statué, en second lieu, sur le principe de la responsabilité de la Commission du fait d’un acte licite, sur lequel le recours des requérantes a été fondé à titre subsidiaire.

16      En écartant, aux points 143 à 153 de l’arrêt attaqué, les arguments des requérantes tirés dudit principe, le Tribunal a notamment jugé, aux points 149 et 150 de cet arrêt, ce qui suit:

«149      En l’espèce, à supposer même que les requérantes parviennent à démontrer qu’elles ont subi un préjudice réel qui a été causé par l’utilisation du terme ‘Galileo’ par la Commission, ce préjudice ne saurait être considéré comme dépassant les limites des risques inhérents à l’exploitation, par les requérantes, du même terme au titre de leurs marques.

150      En effet, en choisissant le nom ‘Galileo’ pour désigner leurs marques, leurs produits et leurs services, les requérantes ne pouvaient pas ignorer qu’elles s’étaient inspirées du prénom de l’illustre mathématicien, physicien et astronome italien, né à Pise en 1564, qui est une des grandes figures de la culture et de l’histoire scientifique européennes. Ainsi, les requérantes se sont volontairement exposées au risque que quelqu’un d’autre, en l’occurrence la Commission, puisse légalement, c’est-à-dire sans porter atteinte à leurs droits de marque, intituler du même nom célèbre son programme de recherche en matière de radionavigation par satellite. Par ailleurs, en 1989, la National Aeronautics and Space Administration (NASA) (administration de l’aéronautique et de l’espace américaine) avait déjà choisi le terme ‘Galileo’ pour désigner une mission spatiale, à savoir le lancement d’un satellite d’observation vers la planète Jupiter.»

17      Les requérantes ayant succombé en leurs conclusions devant lui, le Tribunal a conclu, au point 154 de l’arrêt attaqué, au rejet du recours dans son intégralité.

 Les conclusions des parties devant la Cour

18      En substance, les requérantes concluent à ce que la Cour:

–        annule l’arrêt attaqué, et

–        tranche le litige en faisant droit aux demandes introduites devant le Tribunal.

19      La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation des requérantes aux dépens.

 Sur le pourvoi

20      En vertu de l’article 119 du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, le rejeter par voie d’ordonnance motivée.

21      À l’appui de leurs conclusions tendant à l’annulation de l’arrêt attaqué, les requérantes invoquent cinq moyens. Ces moyens sont tirés, en premier lieu, d’une interprétation erronée, par le Tribunal, de l’expression «dans la vie des affaires» au sens de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104 et de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, en deuxième lieu, de l’existence de contradictions dans la motivation de l’arrêt attaqué, en troisième lieu, d’une omission à statuer sur les arguments tirés de l’article 8 de la convention de Paris, en quatrième lieu, d’une méconnaissance, par le Tribunal, du critère de causalité et, en cinquième lieu, d’une méconnaissance, par celui-ci, des règles applicables à la responsabilité non contractuelle de la Commission.

 Sur le premier moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’expression «dans la vie des affaires»

 Argumentation des parties

22      En premier lieu, les requérantes font valoir que le point 117 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit en ce que le Tribunal a considéré que, pour qu’il y ait atteinte aux droits du titulaire de la marque au sens de l’article 9, paragraphe 1, du règlement nº 40/94 et de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 89/104, il convenait que la Commission offre des biens ou des services sur un marché.

23      En second lieu, le Tribunal aurait, aux points 114 à 118 de l’arrêt attaqué, commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’expression «dans la vie des affaires» en définissant celle-ci de façon restrictive comme se référant à une activité commerciale visant à un avantage économique, alors qu’il serait admis dans l’ensemble des États membres que l’usage non commercial peut constituer une atteinte aux droits du titulaire d’une marque.

24      Selon les requérantes, la notion d’usage «dans la vie des affaires» devrait en réalité être entendue comme couvrant tout usage qui ne poursuit pas un but purement scientifique. À cet égard, elles font valoir que l’article 9, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 ainsi que l’article 5, paragraphe 3, de la directive 89/104 donnent une énumération non limitative des usages interdits d’un signe.

25      La Commission considère que les requérantes n’apportent aucun élément au soutien de leur interprétation de l’expression «dans la vie des affaires», laquelle ne correspondrait ni aux termes du règlement nº 40/94 et de la directive 89/104 ni à la jurisprudence communautaire pertinente.

 Appréciation de la Cour

26      En premier lieu, même si les requérantes contestent, par leur premier moyen, l’appréciation à laquelle s’est livré le Tribunal aux points 116 et 117 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la Commission n’exerce pas une activité économique liée au projet, en ce qu’elle n’offre ni des biens ni des services sur un marché, force est de constater que, ainsi que la Commission le souligne à juste titre, elles n’ont apporté aucun élément visant à étayer leur interprétation des termes «dans la vie des affaires».

27      En effet, devant la Cour, les requérantes ne démontrent pas en quoi l’appréciation portée sur ce point par le Tribunal serait entachée d’une erreur de droit.

28      En second lieu, il convient de relever que le Tribunal a, au point 113 de l’arrêt attaqué, rappelé que, au moment de l’appréciation des faits, la Commission n’avait utilisé le terme «Galileo» que pour désigner de manière globale le projet et qu’il était constant qu’aucun produit et service de radionavigation proprement dit n’existait à ce stade du projet.

29      Ensuite, il a jugé, au point 114 de cet arrêt, en s’appuyant notamment sur l’arrêt du 12 novembre 2002, Arsenal Football Club (C-206/01, Rec. p. I-10273, point 40), que «l’usage d’un signe a lieu ‘dans la vie des affaires’ dès lors qu’il se situe dans le contexte d’une activité commerciale visant à un avantage économique».

30      Pour contester cette interprétation, les requérantes se bornent à invoquer, d’une part, les prétendues pratiques de droit national existant «dans l’ensemble des État membres» et, d’autre part, le caractère non limitatif des exemples énumérés à l’article 9, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 ainsi qu’à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 89/104.

31      Toutefois, les requérantes n’étayent nullement leurs affirmations par des éléments précis de nature à infirmer l’interprétation à laquelle s’est livré le Tribunal au point 114 de l’arrêt attaqué.

32      Ainsi, les requérantes ne démontrent pas en quoi cette même interprétation ne serait pas conforme à la jurisprudence de la Cour en la matière, selon laquelle l’usage d’un signe a lieu dans la vie des affaires dès lors qu’il se situe dans le contexte d’une activité commerciale visant à un avantage économique et non dans le domaine privé (voir arrêts Arsenal Football Club, précité, point 40, et du 25 janvier 2007, Adam Opel, C-48/05, non encore publié au Recueil, point 18).

33      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de l’interprétation qu’il convient de donner de l’expression «dans la vie des affaires» comme manifestement non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une motivation contradictoire de l’arrêt attaqué

 Sur la première branche du deuxième moyen

34      Par cette branche, les requérantes font valoir que le Tribunal a retenu des motifs contradictoires en ce qu’il aurait reconnu, au point 115 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait elle-même souligné la finalité commerciale du projet dont les raisons d’être seraient «son exploitation économique» et, au point 117 de cet arrêt, qu’elle faisait usage du terme «Galileo» non pas uniquement dans la phase de recherche et de développement, mais également dans celle de déploiement du projet.

35      La Commission fait valoir que, à la lumière de l’ensemble du raisonnement exposé aux points 103 à 136 de l’arrêt attaqué, aucune contradiction ne découle des points 115 et 117 de cet arrêt.

36      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C-352/98 P, Rec. p. I-5291, point 34; du 8 janvier 2002, France/Monsanto et Commission, C-248/99 P, Rec. p. I-1, point 68, et du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C-41/00 P, Rec. p. I-2125, point 15).

37      En l’occurrence, il convient de relever tout d’abord que si, par cette branche, les requérantes font certes état de «motifs contradictoires», elles ne précisent toutefois pas explicitement quelle partie de l’arrêt attaqué serait en contradiction avec les éléments qu’elles mettent en exergue, lesquels figurent aux points 115 et 117 de l’arrêt attaqué.

38      Néanmoins, une lecture globale du pourvoi permet de constater que, par ladite branche du moyen, les requérantes invoquent, en substance, une contradiction entre les points 115 et 117 de l’arrêt attaqué, d’une part, et la constatation figurant au point 118 de cet arrêt, selon laquelle elles n’avaient pas établi que l’usage par la Commission du terme «Galileo» avait lieu «dans la vie des affaires», d’autre part.

39      Dès lors, l’argument qui soutient cette branche est suffisamment clair pour satisfaire aux exigences posées aux articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour.

40      Cela étant, force est de constater qu’une telle argumentation ne saurait être accueillie.

41      En effet, il ressort de l’arrêt attaqué que le Tribunal a dûment apprécié, aux points 111 à 118 de celui-ci, si l’usage par la Commission du terme «Galileo» était susceptible de porter atteinte aux fonctions des marques invoquées et s’il avait lieu «dans la vie des affaires» au sens de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104 et de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

42      Dans ce contexte, au point 115 dudit arrêt, le Tribunal a constaté que la Commission avait certes souligné la finalité commerciale du projet.

43      Or, au point suivant de ce même arrêt, que les requérantes ne citent pas dans leur argumentation, le Tribunal a jugé que le rôle de la Commission était néanmoins limité au lancement, au soutien financier des phases de recherche, de développement et de déploiement du projet ainsi qu’à l’établissement du cadre approprié pour la phase d’exploitation économique ultérieure. Par ailleurs, au point 117 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté notamment que la Commission, par son utilisation du terme «Galileo» dans le cadre du projet, ne visait pas à obtenir un avantage économique par rapport à d’autres opérateurs.

44      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les requérantes n’ont aucunement démontré en quoi une contradiction existerait dans les motifs du Tribunal, entre, d’une part, les éléments exposés aux points 115 et 117 de l’arrêt attaqué et, d’autre part, la conclusion figurant au point 118 de celui-ci.

45      Dès lors, en tant que la première branche du deuxième moyen peut être comprise comme constituant l’invocation d’une contradiction entre les points 115 et 117 de l’arrêt attaqué, d’une part, et le point 118 de cet arrêt, d’autre part, force est de constater que cette branche est dépourvue de substance et qu’elle doit être rejetée comme manifestement non fondée.

 Sur la seconde branche du deuxième moyen

46      La seconde branche de ce moyen est tirée d’une contradiction entre les points 123 et 124 de l’arrêt attaqué. De l’avis des requérantes, dès lors que le Tribunal aurait reconnu, au point 117 de cet arrêt, que la Commission faisait usage du signe «Galileo» au stade du développement du projet – qui précéderait immédiatement celui de l’exploitation – le point 123 dudit arrêt reviendrait à admettre que le juge communautaire peut condamner la Commission «dès que la cause du préjudice est certaine». Dans ces conditions, selon les requérantes, le Tribunal ne saurait sans se contredire énoncer ensuite, au point 124 de l’arrêt attaqué, qu’une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit devait avoir été effectivement commise. En effet, même si le Tribunal estimait que le dommage allégué par les requérantes n’était pas actuel, la condition relative à l’existence d’un «dommage imminent et prévisible» serait remplie.

47      La Commission fait valoir que, à la lumière de l’ensemble du raisonnement exposé aux points 103 à 136 de l’arrêt attaqué, aucune contradiction n’apparaît entre les points indiqués par les requérantes.

48      À cet égard, ainsi que le Tribunal l’a indiqué, à juste titre, au point 123 de l’arrêt attaqué, le juge communautaire est autorisé, en matière indemnitaire, à condamner l’institution défenderesse au paiement d’une somme d’argent déterminée ou à constater sa responsabilité, même si le préjudice ne peut pas encore être chiffré avec précision, à condition qu’il s’agisse d’un dommage imminent et prévisible avec une certitude suffisante, le juge pouvant ainsi être saisi pour prévenir des dommages plus considérables dès que la cause du préjudice est certaine (arrêts précités Kampffmeyer e.a./Commission et Conseil, point 6, et Zuckerfabrik Bedburg e.a./Conseil et Commission, point 14).

49      Or, il n’en demeure pas moins que, selon une jurisprudence constante en matière de responsabilité de la Communauté pour des dommages causés à des particuliers du fait d’une violation du droit communautaire imputable à une institution ou à un organe communautaire, un droit à réparation est reconnu dès lors que trois conditions sont réunies, à savoir que la règle de droit violée ait pour objet de conférer des droits aux particuliers, que la violation soit suffisamment caractérisée et qu’il existe un lien de causalité direct entre la violation de l’obligation qui incombe à l’auteur de l’acte et le dommage subi par les personnes lésées (voir arrêts Bergaderm et Goupil/Commission, précité, points 41 et 42; du 10 juillet 2003, Commission/Fresh Marine, C-472/00 P, Rec. p. I-7541, point 25, et du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts, C-234/02 P, Rec. p. I-2803, point 49).

50      Le Tribunal était donc en droit, au point 124 de l’arrêt attaqué, de rappeler en substance que, abstraction faite de la question de l’existence d’un dommage imminent et prévisible avec une certitude suffisante, il devait en tout état de cause être démontré que la Commission avait commis une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits à la partie requérante.

51      En l’espèce, il suffit de constater que, par l’argumentation invoquée au soutien de cette branche du deuxième moyen, les requérantes confondent la question de l’existence d’une violation caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux requérantes, d’une part, et celle de l’existence d’un préjudice imminent et prévisible, d’autre part.

52      Par conséquent, les requérantes n’ont pas démontré l’existence d’une contradiction entre les points 123 et 124 de l’arrêt attaqué, qui ont trait chacun à l’une ou l’autre desdites questions.

53      Dès lors, il convient de rejeter la seconde branche du deuxième moyen et, partant, ce moyen dans son intégralité, comme manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une omission à statuer sur certains arguments soulevés devant le Tribunal

 Argumentation des parties

54      En premier lieu, les requérantes soutiennent que le point 108 de l’arrêt attaqué ne répond pas à leur argumentation selon laquelle la Commission annonçait qu’elle allait offrir des produits ou services sous le signe «Galileo».

55      En second lieu, les requérantes invoquent une atteinte portée à leurs raisons sociales et à leurs noms commerciaux. En effet, elles reprochent au Tribunal, en substance, de ne pas avoir statué sur leur argumentation tirée de l’article 8 de la convention de Paris, sauf à considérer que cette disposition ne constitue pas une harmonisation des règles relatives aux droits conférés par un nom commercial.

56      La Commission considère, d’une part, que l’argumentation exposée au point 54 de la présente ordonnance semble porter sur des éléments de fait, ce qui ne pourrait être admis dans le cadre d’un pourvoi.

57      D’autre part, en ce qui concerne l’atteinte alléguée aux raisons sociales et aux noms commerciaux des requérantes, la Commission fait valoir que le Tribunal a déclaré cette argumentation irrecevable pour les motifs énoncés aux points 50 à 59 de l’arrêt attaqué.

 Appréciation de la Cour

58      Au point 108 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que les requérantes n’avaient pas établi que la Commission offrait elle-même des produits ou des services en relation avec le projet. Il a étayé cette conclusion au point 109 dudit arrêt, en écartant comme non probants les éléments pertinents de l’argumentation avancée à l’appui du recours présenté devant lui.

59      Force est donc de constater que les requérantes, en alléguant que le Tribunal n’a pas répondu à leur argumentation selon laquelle la Commission annonçait qu’elle allait offrir des produits ou services sous le signe «Galileo», sans faire valoir une quelconque dénaturation des éléments de preuve fournis, tentent en réalité d’obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits constatés par le Tribunal.

60      Or, il résulte d’une jurisprudence constante que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, notamment, arrêts du 2 octobre 2001, BEI/Hautem, C-449/99 P, Rec. p. I-6733, point 44, et du 19 janvier 2006, Comunità montana della Valnerina/Commission, C-240/03 P, Rec. p. I-731, point 63).

61      Dans ces conditions, l’argumentation portant sur le point 108 de l’arrêt attaqué doit être rejetée comme manifestement irrecevable.

62      Par ailleurs, en ce qui concerne l’argumentation exposée au point 55 de la présente ordonnance, il n’est pas exact que le Tribunal a omis de statuer sur l’argument soulevé devant lui, tiré d’une atteinte portée aux raisons sociales et aux noms commerciaux des requérantes, lequel s’appuyait sur l’article 8 de la convention de Paris.

63      En effet, le Tribunal a, au point 59 de l’arrêt attaqué, rejeté cet argument comme irrecevable, ce que les requérantes n’ont pas contesté devant la Cour.

64      Il s’ensuit que, sans que l’interprétation donnée par le Tribunal de l’article 8 de ladite convention doive être examinée par la Cour dans le cadre du présent pourvoi, l’argument relatif à la protection des raisons sociales et des noms commerciaux des requérantes doit être rejeté comme manifestement non fondé.

65      Dès lors, il convient de rejeter le troisième moyen comme en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une méconnaissance du critère de causalité

 Argumentation des parties

66      Les requérantes critiquent la conclusion du Tribunal, énoncée au point 135 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le choix des entreprises désireuses d’exploiter économiquement le projet d’utiliser le terme «Galileo» dans le cadre de leurs activités économiques «doit être considéré comme étant la cause directe et déterminante du préjudice allégué, l’éventuelle contribution de la Commission à ce préjudice étant trop éloignée pour que la responsabilité incombant aux entreprises en cause puisse être rejetée sur la Commission».

67      Selon les requérantes, pour que soit admise une atteinte aux droits conférés par la marque dont est titulaire Galileo International Technology LLC ainsi qu’aux droits liés à la raison sociale et au nom commercial de l’ensemble des requérantes, il suffirait que la Commission ait incité des tiers à utiliser le terme «Galileo» pour leurs activités commerciales en rapport avec son projet. Cette incitation suffirait à établir l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct pour engager la responsabilité de la Commission au sens des articles 235 CE et 288, deuxième alinéa, CE.

68      La Commission conclut au rejet de cette argumentation, en faisant valoir, en particulier, que la référence faite par les requérantes aux droits liés à la raison sociale et au nom commercial n’est pas pertinente, étant donné que les points 103 à 136 de l’arrêt attaqué ne concernent pas ces droits.

 Appréciation de la Cour

69      Le quatrième moyen se fonde sur la prémisse selon laquelle la Commission a «induit des tiers à utiliser le terme ‘Galileo’ pour leurs activités commerciales». Or, il ne ressort pas de l’arrêt attaqué qu’une telle prémisse ait été démontrée devant le Tribunal. Au contraire, ce dernier a notamment jugé, au point 133 de cet arrêt, que «les requérantes n’ont pas établi que la Commission aurait obligé lesdites entreprises à employer ce terme ou qu’elle les aurait activement incitées, sous forme d’une collusion, à le faire».

70      Dans ces conditions, force est de constater que, par ce moyen, les requérantes visent en réalité à remettre en cause cette appréciation factuelle effectuée souverainement par le Tribunal, sans pour autant alléguer une quelconque dénaturation des éléments de preuve fournis.

71      Dès lors, en application de la jurisprudence déjà rappelée au point 60 de la présente ordonnance, ce moyen doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une méconnaissance des règles applicables à la responsabilité de la Commission du fait d’un acte licite

 Argumentation des parties

72      D’après les requérantes, la constatation opérée par le Tribunal au point 149 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, «à supposer même que les requérantes parviennent à démontrer qu’elles ont subi un préjudice réel qui a été causé par l’utilisation du terme ‘Galileo’ par la Commission, ce préjudice ne saurait être considéré comme dépassant les limites des risques inhérents à l’exploitation, par les requérantes, du même terme au titre de leurs marques», serait dépourvue de pertinence dans la mesure où une telle constatation serait valable pour toute marque quelle qu’elle soit.

73      Par ailleurs, selon les requérantes, il ne pourrait être contesté que les intérêts économiques protégés par le dépôt ou l’enregistrement d’une marque ainsi que par l’utilisation d’un nom commercial sont propres à chaque titulaire, possesseur des signes distinctifs représentés par ces marque et nom. Contrairement à ce que le Tribunal a jugé au point 149 de l’arrêt attaqué, le préjudice allégué serait donc bien «spécial».

74      La Commission soutient qu’il n’est pas vrai que le raisonnement figurant au point 149 de l’arrêt attaqué est valable pour toute marque. Elle fait également valoir que l’argumentation du Tribunal figurant aux points 149 à 151 dudit arrêt est pertinente pour l’appréciation du caractère anormal du préjudice prétendument subi par les requérantes.

 Appréciation de la Cour

75      En premier lieu, il ne saurait être soutenu que le raisonnement du Tribunal portant sur la nature du nom «Galileo» est valable pour toute marque quelle qu’elle soit. En effet, il résulte du point 150 de l’arrêt attaqué que ce raisonnement est précisément fondé sur la spécificité, dans les circonstances de l’espèce, de ce nom. L’argument portant sur ce point doit donc être rejeté comme manifestement non fondé.

76      En second lieu, la Cour a déjà jugé que la responsabilité non contractuelle de la Communauté ne saurait être engagée du fait d’un acte licite que si trois conditions cumulatives sont remplies, à savoir la réalité du préjudice prétendument subi, le lien de causalité entre celui-ci et l’acte reproché aux institutions de la Communauté ainsi que le caractère anormal et spécial du préjudice allégué (voir arrêt du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, C-237/98 P, Rec. p. I-4549, points 19 et 53).

77      S’agissant des dommages que peuvent subir les opérateurs économiques du fait des activités des institutions communautaires, un préjudice est, d’une part, anormal lorsqu’il dépasse les limites des risques économiques inhérents aux activités dans le secteur concerné (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 1984, Biovilac/CEE, 59/83, Rec. p. 4057, point 28) et, d’autre part, spécial lorsqu’il affecte une catégorie particulière d’opérateurs économiques d’une façon disproportionnée par rapport aux autres opérateurs (voir, en ce sens, arrêt du 29 septembre 1987, De Boer Buizen/Conseil et Commission, 81/86, Rec. p. 3677, point 17).

78      Au point 149 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a notamment jugé que le préjudice allégué «ne saurait être considéré comme dépassant les limites des risques inhérents à l’exploitation, par les requérantes, du même terme au titre de leurs marques». Il en a ainsi conclu en substance que, en tout état de cause, le préjudice prétendument subi par les requérantes ne saurait être qualifié d’«anormal» au sens de la jurisprudence pertinente.

79      Or, l’argumentation exposée au point 73 de la présente ordonnance, selon laquelle le préjudice allégué serait spécial, n’est à l’évidence pas de nature à remettre en cause cette conclusion, qui est, pour sa part, relative au caractère anormal de ce préjudice.

80      Dès lors, il convient de rejeter l’argument portant sur le point 149 de l’arrêt attaqué et, partant, le cinquième moyen dans son intégralité comme manifestement non fondé.

81      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté comme en partie manifestement non fondé et en partie manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

82      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation des requérantes et ces dernières ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Galileo International Technology LLC, Galileo International LLC, Galileo Belgium SA, Galileo Danmark A/S, Galileo Deutschland GmbH, Galileo España, SA, Galileo France SARL, Galileo Nederland BV, Galileo Nordiska AB, Galileo Portugal Ltd, Galileo Sigma Srl, Galileo International Ltd, The Galileo Co. et Timas Ltd sont condamnées aux dépens.

Signatures

* Langue de procédure: le français.



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