IP case law Court of Justice

Order of 10 Jun 2025, C-32/25 (Domingo Alonso Group v EUIPO)



ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

10 juin 2025 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C-32/25 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 20 janvier 2025,

Domingo Alonso Group SL, établie à Las Palmas de Grande Canarie (Espagne), représentée par Me J. García Domínguez, abogado,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Ald Automotive SA, établie à Majadahonda (Espagne),

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois),

composée de M. T. von Danwitz, vice-président de la Cour, MM. M. Gavalec et F. Schalin (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. N. Emiliou, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Domingo Alonso Group SL demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 6 novembre 2024, Domingo Alonso Group/EUIPO – Ald Automotive et Salvador Caetano Auto (my CARFLIX) (T-200/23, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2024:785), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation partielle de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 24 octobre 2022 (affaire R 2213/2021-5), relative à une procédure de nullité entre Ald Automotive SA, Domingo Alonso Group et Salvador Caetano Auto (SGPS) SA.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, de ce règlement, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

 Argumentation de la partie requérante

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que les trois moyens soulevés à l’appui de son pourvoi soulèvent des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

7        Par son premier moyen, divisé en trois branches, la requérante allègue une violation, par le Tribunal, de l’article 60, paragraphe 1, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement. Plus précisément, la requérante reproche au Tribunal, en premier lieu, d’avoir écarté l’élément « my » du signe contesté lors de son appréciation de la similitude des signes en conflit. Elle lui reproche également, en deuxième lieu, de ne pas avoir tenu compte du caractère distinctif manifestement faible de la marque antérieure et, en troisième et dernier lieu, de ne pas avoir procédé à une appréciation globale de l’existence du risque de confusion.

8        Selon la requérante, ce faisant, le Tribunal a méconnu la jurisprudence de la Cour ainsi que sa propre jurisprudence portant, premièrement, sur le caractère distinctif des marques composées d’une seule lettre ou d’un seul chiffre, deuxièmement, sur l’appréciation des marques revêtant un caractère distinctif faible et, troisièmement, sur l’appréciation du risque de confusion. L’admission du pourvoi s’imposerait afin de garantir une interprétation cohérente du droit de l’Union, dans la mesure où la Cour devrait porter une appréciation sur la similitude de marques en conflit composées d’éléments courts au regard de la jurisprudence existante en la matière.

9        Par ailleurs, d’une part, la requérante affirme que les erreurs commises par le Tribunal, lors de son appréciation de la similitude des marques en conflit, ont conduit à une dénaturation des faits du litige et que l’arrêt attaqué est susceptible de constituer un précédent erroné qui pourrait être, à tort, pris en considération à l’occasion de procédures futures.

10      D’autre part, elle soutient que les motifs juridiques sur lesquels le Tribunal s’est fondé dans l’arrêt attaqué sont entachés d’un défaut de motivation de nature à porter atteinte à l’unité et à la cohérence du droit de l’Union.

11      Par son deuxième moyen, la requérante allègue une violation, par le Tribunal, de l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, en ce qu’il a estimé que la marque antérieure revêtait un caractère distinctif normal, sans toutefois motiver son appréciation, comme l’exigerait la jurisprudence de la Cour issue de l’arrêt du 1er décembre 2016, Klement/EUIPO (C-642/15 P, EU:C:2016:918, point 24). À cet égard, la requérante avance que, selon la jurisprudence, la question de savoir si la motivation d’une décision du Tribunal est contradictoire ou insuffisante constitue une question de droit pouvant faire l’objet d’un contrôle juridictionnel dans le cadre d’un pourvoi.

12      Par son troisième et dernier moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une dénaturation des faits du litige, tout d’abord, en concluant à l’existence d’un risque de confusion sans prendre en compte tous les éléments verbaux des signes en conflit, ensuite, en considérant que la marque antérieure revêtait un caractère distinctif normal et, enfin, en omettant d’apprécier le degré d’attention du public pertinent quant aux services relevant des classes 35 et 39 de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

 Appréciation de la Cour

13      À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 18).

14      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut vise à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 19).

15      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 20).

16      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

17      En l’espèce, concernant, en premier lieu, l’argumentation résumée au point 8 de la présente ordonnance et relative à une prétendue méconnaissance, par le Tribunal, de la jurisprudence de la Cour et de sa propre jurisprudence, il convient de rappeler qu’une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, le demandeur devant respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance (ordonnance du 11 février 2025, W.B. Studio/EUIPO, C-608/24 P, EU:C:2025:77, point 18 et jurisprudence citée).

18      Or, d’une part, la requérante se limite à présenter la jurisprudence de la Cour et du Tribunal relative au caractère distinctif des marques composées d’une seule lettre ou d’un seul chiffre, sans toutefois fournir d’indications quant à la similitude alléguée entre la situation faisant l’objet de l’arrêt attaqué et celles visées dans la jurisprudence qui aurait été méconnue par le Tribunal, permettant d’établir la réalité des contradictions invoquées. D’autre part, elle se borne à alléguer une méconnaissance de la jurisprudence de la Cour et du Tribunal relative à l’appréciation des marques revêtant un caractère distinctif faible, ainsi que de celle portant sur l’appréciation du risque de confusion, sans toutefois identifier de façon claire et précise les points des décisions de la Cour et du Tribunal qui auraient été méconnus. Dès lors, force est de constater qu’une telle argumentation ne répond pas aux exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance.

19      En deuxième lieu, s’agissant de l’argumentation exposée aux points 9 et 12 de la présente ordonnance, par laquelle la requérante invoque une prétendue dénaturation des faits commise par le Tribunal, il y a lieu de relever également que, contrairement à ce que soutient la requérante, une telle argumentation ne saurait, en principe, être susceptible, en tant que telle et même à la supposer fondée, de soulever une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 23 février 2024, Breville/EUIPO, C-707/23 P, EU:C:2024:168, point 22 et jurisprudence citée).

20      En troisième et dernier lieu, concernant l’argumentation résumée aux points 10 et 11 de la présente ordonnance et tirée d’un défaut de motivation de l’arrêt attaqué, il convient de rappeler que, si le défaut ou l’insuffisance de motivation d’une décision du Tribunal constitue une erreur de droit qui peut être invoquée dans le cadre d’un pourvoi, l’admission d’un pourvoi demeure toutefois subordonnée au respect des conditions spécifiques consistant, pour la requérante au pourvoi, à démontrer, au sens indiqué au point 15 de la présente ordonnance, que ce pourvoi soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 25 janvier 2024, CEDC International/EUIPO, C-553/23 P, EU:C:2024:93, point 20 et jurisprudence citée).

21      Or, force est de constater que la requérante n’explique pas les raisons pour lesquelles le défaut de motivation qu’elle allègue soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

22      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la demande d’admission du pourvoi présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

23      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

24      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

25      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Domingo Alonso Group SL supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol



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